Tutos, couture et écriture
17 Novembre 2017
Hier, j'ai appris que ma coupine Tasticottine s'était fait larguer. Honnêtement, je m'en doutais. J'avais bien vu sur insta ses courses à pied en solitaire et son amourette naissante avec une paire de baskets rose. J'avais compris qu'il n'y avait plus la flamme, le mojo, Qu'il n'y avait plus la Fièvre.
Je me suis dit que c'était honnête et courageux de se dévoiler ainsi.
Alors, voilà, je vais tout te dire moi aussi.
Je me fais tabasser.
#balancetonporc
J'ai réalisé la place que ça avait pris dans ma vie une fois où j'avais atterri chez ma toubib un jour de grande fatigue. Elle regardait d'un œil suspicieux les marques sur mes mains et mon dos un peu trop vouté.
A la fin de la consultation, elle m'a demandé si j'arrivais à prendre du temps pour moi. Peut-être que cela me ferait du bien de pratiquer une activité sportive ? Glaçante, implacable, une voix a murmuré à mon oreille : "DIS LUI QUE TU FAIS DE LA SURJETEUSE". C'était la Couture.
Ca n'a pas toujours été comme ça, la Couture et moi. Je ne sais pas quand ça a commencé. Elle veut que je lui appartienne. Elle me prend tout. Tu vois, on va faire des travaux dans notre maison, et il y a cette pièce parfaite sous la soupente du toit. Penchée sur les plans, la Couture a dit :
- ON VA FAIRE UN ATELIER.
- Tu es sûre ? Si grand ? Mais ça serait une chouette pièce pour une chambre d'ami, ou peut-être un jour si dans très longtemps il y a un petit frère ou...
- ON A PAS LE TEMPS POUR CES PROJETS STUPIDES. ON FERA UN ATELIER
- Bon, d'accord, un petit atelier alors, cosy et confortable qui pourrait aussi servir de débarras pour..
- NON. ON VA FAIRE LE MEME QUE LAETIBRICOLE
Parfois, elle m'autorise une sortie. Le mercredi soir, pour aller à mon cours de couture, où je rencontre d'autres victimes. TU METTRAS UN VETEMENT QUE TU AS FAIS TOI-MEME.
C'est exceptionnel, et souvent quand je suis invitée à aller voir un concert ou boire un coup en ville, la Couture s'interpose. UNE AUTRE FOIS. DIS QUE TU ES OCCUPEE. Je tente faiblement de lui faire entendre raison. Elle menace de me faire avaler ma To-sew list. ON DOIT FAIRE UNE ROBE DE PRINCESSE. CE SOIR.
Le matin, elle me laisse aller travailler. Je me dis que c'est pour mon bien, mais je vois bien qu'au final, elle récupère mon salaire à son seul profit.
- IL FAUT DE L'ARGENT POUR ACHETER DU TISSU, L'ENFANT MANGERA DES EPLUCHURES.
La Couture est vicieuse. Elle épuise mes ressources. Quand Papa Dodu m'a demandée en mariage (cet été, si tu n'as pas suivi), la Couture n'était pas loin. J'ai vu une lumière effrayante s'allumer dans ses yeux, elle a lâché dans un rictus : ON FERA LA ROBE. J'ai tremblé, "Mais si elle est moche, si je ne trouve pas le tissu qu'il faut, si l'échec est tel que Papa Dodu change d'avis..." ON FERA AUSSI UN COSTUME POUR PETIT DODU.
J'ai cru qu'elle en resterait là, mais elle est revenue à la charge devant les devis traiteur.
- 1 euros la serviette louée le temps d'une soirée, multiplié par 180 invités potentiels..
- ON VA LES COUDRE.
- Ah non, ça non, vraiment, c'est trop long, on regardera plutôt pour des serviettes en papier
- ON EST ECOLOS.
La couture me maltraite. Elle m'envahit. Elle me domine.
L'autre jour je glandais sur internet, je regardais le trench luzerne et je lisais "Le trench luzerne est la pièce la plus complexe jamais éditée par Deer and Doe". Je m'apprêtais à fermer l'onglet mais la Couture, tapie dans l'ombre, a surgi et m'a murmuré : FAIS-LE
J'ai chuchoté en étranglant un sanglot -la Couture m'impressionne- "Pas la peine, c'est bientôt l'hiver et puis tu sais j'ai déjà un trench" (j'en ai trois pour être honnête). La Couture a ricané. FAIS LE EN BLEU.
J'ai choisi un sergé parfait chez Tissus.net. Après ça, la Couture ne m'a pas lâchée pendant près de douze heures.
ON Y VA MAINTENANT.
Mais attend, je raconte sur mon blog que...
ON Y VA. MAINTENANT.
...